Signé Dr Joelle Laffont, Médecin Vasculaire, Toulouse
"Je me sers des animaux pour instruire les hommes." Jean de la Fontaine
"Il se faut s'entraider, c'est la loi de la nature." Jean de la Fontaine
Pendant le confinement saison 1 j’ai découvert cette fable de Jean de la Fontaine « L’ours et l’amateur des jardins » (Livre VIII, fable 10), dite par Fabrice LUCCHINI que l’on peut aimer ou pas, mais l’intérêt est dans le texte. 
Alors confinement saison 2 aidant, j’ai repris ce texte et vous le livre puisque l’on peut encore se nourrir …. l’esprit.
Vous pouvez aussi l’écouter https://www.facebook.com/minutebuzz/videos/661627714601377/
L’ours et l’Amateur des jardins..
 
 Certain Ours montagnard, Ours à demi léché,
 Confiné par le sort dans un bois solitaire,
 Nouveau Bellérophon(1) vivait seul et caché :
 Il fût devenu fou ; la raison d'ordinaire
 N'habite pas longtemps chez les gens séquestrés (2):
 Il est bon de parler, et meilleur de se taire,
 Mais tous deux sont mauvais alors qu'ils sont outrés.
                Nul animal n'avait affaire
                Dans les lieux que l'Ours habitait ;
                Si bien que tout Ours qu'il était
 Il vint à s'ennuyer de cette triste vie.
 Pendant qu'il se livrait à la mélancolie,
                Non loin de là certain vieillard
                S'ennuyait aussi de sa part.
 Il aimait les jardins, était Prêtre de Flore,
                Il l'était de Pomone encore : (3)
 Ces deux emplois sont beaux. Mais je voudrais parmi
                Quelque doux et discret ami.
 Les jardins parlent peu, si ce n'est dans mon livre ;
                De façon que, lassé de vivre
 Avec des gens muets notre homme un beau matin
 Va chercher compagnie, et se met en campagne.
                L'Ours porté d'un même dessein
                Venait de quitter sa montagne :
                Tous deux, par un cas surprenant
                Se rencontrent en un tournant.
 L'homme eut peur : mais comment esquiver ; et que faire ?
 Se tirer en Gascon d'une semblable affaire
 Est le mieux. Il sut donc dissimuler sa peur.
                L'Ours très mauvais complimenteur,
 Lui dit : Viens-t'en me voir. L'autre reprit : Seigneur,
 Vous voyez mon logis ; si vous me vouliez faire
 Tant d'honneur que d'y prendre un champêtre repas,
 J'ai des fruits, j'ai du lait : Ce n'est peut-être pas
 De nos seigneurs les Ours le manger ordinaire ;
 Mais j'offre ce que j'ai. L'Ours l'accepte ; et d'aller.
 Les voilà bons amis avant que d'arriver.
 Arrivés, les voilà se trouvant bien ensemble ;
                Et bien qu'on soit à ce qu'il semble
                Beaucoup mieux seul qu'avec des sots,
 Comme l'Ours en un jour ne disait pas deux mots
 L'Homme pouvait sans bruit vaquer à son ouvrage.
 L'Ours allait à la chasse, apportait du gibier,
                Faisait son principal métier
 D'être bon émoucheur (4), écartait du visage
 De son ami dormant, ce parasite ailé,
                Que nous avons mouche appelé.
 Un jour que le vieillard dormait d'un profond somme,
 Sur le bout de son nez une allant se placer
 Mit l'Ours au désespoir ; il eut beau la chasser.
 Je t'attraperai bien, dit-il. Et voici comme.
 Aussitôt fait que dit ; le fidèle émoucheur
 Vous empoigne un pavé, le lance avec roideur,
 Casse la tête à l'homme en écrasant la mouche,
 Et non moins bon archer (5) que mauvais raisonneur :
 Roide mort étendu sur la place il le couche.
 Rien n'est si dangereux qu'un ignorant ami ;
                Mieux vaudrait un sage ennemi.
(2) séparés du monde
(3) Flore et Pomone : déesses des fleurs et des vergers
(4) Celui qui chasse les mouches....
(5) Habile à viser
Cette fable et Les deux Amis, sont d'origine indienne. La Fontaine les a empruntées à Pilpay, sage indien (traduction de Gaulmin en 1644 sous le titre Le Livre des Lumières, d'une version arabe du Pantchatantra.)
http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/oursamat.htm
#1MASQUEPOURTOUS, le refrain de ce Blog
				